Je voudrais, si vous le permettez, vous faire part de deux événements que j'ai vécu personnellement. Merci de m'écouter. Le premier très émouvant et ... dramatique concerne Graham Hill. Le second est inattendu et amusant. Nous sommes le 30 novembre 1975. Mon copain Jacques Noël, avait participé à l'école de pilotage du circuit Paul Ricard. Il n'avait pas été l'heureux élu, mais avait affiché de bonnes performances pendant le stage. Pour remercier tous ces bons "seconds pilotes", l'école avait eu la bonne idée (n'est ce pas ?) d'organiser une petite course pour s'amuser entre eux sur la partie inférieure du circuit. Nous voilà partis, Jacques, sa copine Gaby et moi (hé ! hé !). Grâce aux performances réalisées pendant le stage, Jacques va partir en pole position. Non ? Pourquoi ? Qui c'est cet inconnu qui arrive avec sa voiture ? Je ne sais pas. Je crois qu'il s'appelle Alain Prost, il a été invité par l'école. Jacques va partir en première ligne, à coté de ... Prost. Ce dernier s'échappera et Jacques se maintiendra en deuxième position tout au long de la course, à une cinquantaine de mètres d'Alain Prost. Exceptionnel ! En tant que invités privilégiés, nous sommes tous conviés à nous rendre sur le circuit Nord où quelques écuries de Formule Un effectuent des essais privés. Nous voilà donc, excités comme de jeunes enfants, en train de nous balader librement au milieu des mécaniciens et des voitures. Au bas des stands il y a Jacques Laffite et la Ligier, vers le milieu des stands nous voyons Tom Pryce et la Shadow puis, avec Gaby, nous remontons vers les premiers stands où se trouve l'écurie Lola Ambassy. Tony Bryse et ses mécaniciens sont penchés sur le moteur pour faire quelques réglages. Gaby m'appelle : - Claude, c'est la voiture de Graham Hill ! Est-il là ? Quelques secondes s'écoulent et Graham sort de l'ombre des stands dans sa légendaire démarche balançante. Comme tous bons admirateurs qui se respectent, Gaby et moi restons figé sur place, la chair de poule nous envahit et ma seule réaction est un sourire admiratif et songeur. Graham nous rend le sourire en passant devant nous. Graham Hill, pilote que j'ai toujours admiré, est là, proche comme de vous à moi. Il est accompagné de trois cameramen. Il s'adosse à un camion, une interview se prépare. Il sort son légendaire peigne de la poche arrière de son pantalon et donne une ligne parfaite à sa coiffure. Un reporter s'approche de lui et, à hauteur de son visage, assigne l'indispensable clap "Graham, première". Avec tout le respect que je lui porte, il faut reconnaître que Graham Hill a un nez, disons... qui ne passe pas inaperçu. Je me tourne vers Gaby et de l'index et du médius, mime de me couper le nez d'un coup de ciseaux. Graham s'en aperçoit, nous regarde d'un air complice et sourit en hochant légèrement la tête pour nous faire comprendre qu'il accepte notre plaisanterie. La prise de vue est à refaire et, sur la pointe des pieds, nous nous éloignons pour respecter le travail de Graham Hill. Pour fêter l'excellente performance de mon copain Jacques, nous nous arrêtons au buffet de l'aéroport, à droite, en sortant du circuit. Peu de temps après, la porte s'ouvre : Graham Hill, Tony Bryse et les mécaniciens de Lola Ambassy traversent le hall en direction de leur avion. En passant devant nous, Graham Hill nous fait un petit sourire, d'un geste amical salue toutes les personne attablées, et s'éloigne (mais cela, personne le sait encore) vers la Mort ! Quelques heures plus tard, sur le chemin du retour, la radio annonce que l'avion transportant Graham Hill et ses amis s'est écrasé à l'attérissage entrainant le décès de tous les passagers. Jacques s'est retrouvé debout sur les freins et, dans la voiture arrêtée au milieu de la route, nous avons, tous les trois, pleuré la disparition de cet inoubliable champion. |
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