Le Sphinx ? Oui, je connais, c'est en Egypte.
L'Egypte, c'est le rallye des Pharaons. Ce Petit rallye qui a séduit les aventuriers et qui est devenu Grand. En courses rallyes raids, les Pharaons occupent désormais cette place, en préparation du prochain Paris-Dakar. Les écuries officielles viennent éprouver leurs nouvelles montures.En 1988, seule l'écurie Peugeot est au rendez-vous. Ah ! Mais non, j'allais oublier, il y a une Lada officielle, celle de Jacky Ickx-Tarin. Oh ! Il va se promener comme au Dakar. Ah oui ? Et bien voyons cela de plus près.
L'invincible Vatanen sur Peugeot remporte le prologue qui situe Ickx en 7eposition. Au départ de la première étape, les voitures sont encore fraîches et la bagarre est de taille. Au beau milieu du trio infernal Peugeot, un grain de sable se fait très désagréable. Ce grain de sable se nomme Lada. Nous avons Vatanen, Ickx, Grundel et Michèle Mouton. Le lendemain, les lionnes sortent leurs griffes et se placent devant la Lada. La 3e étape voit un Jacky Ickx survolté, qui termine seulement à 20" de Vatanen, et qui se hisse du coup à la 2e place au général. Non mais alors ? Ca va durer longtemps, votre petit jeu ? Je participe moi aussi !
Mais les Lada sont, on le sait, malades des transmissions. Plouf ! On redescend à la 3e place, derrière Vatanen et Grundel. Jacky ne doit pas baisser les bras car Michèle Mouton n'est pas loin. Il sort le grand jeu. C'est ainsi qu'au cours de cette nouvelle étape, grâce aux moyens télévisés qui couvrent le rallye, nous allons régaler nos yeux : nous abordons une grande courbe à droite très large mais aussi très sablonneuse. La caméra suit la voiture de Vatanen, qui, d'une maîtrise parfaite "balance" la Peugeot en glissade, tout en force, tout au long de la courbe. Rien de bien surprenant de la part du talentueux Finlandais. Mais, qu'est-ce qui arrive dans le coin de l'écran ? Une petite voiture blanche, haute sur patte, c'est la Lada de Ickx. Carrément sur le fil de la corde, d'une trajectoire imperturbable, comme guidée par des rails, elle double la Peugeot, lentement, minutieusement. Deux voitures différentes, deux styles de pilotage différent, mais que de belles images. Ickx remporte l'étape devant un Vatanen très légèrement vexé. Peu importe, se dit Jacky tout fier (et il peut l'être) de cette leçon.
Et, pour ceux qui auraient manqué ces belles images, allumez votre écran. Aujourd'hui c'est une autre Peugeot qui va être la victime de la Lada. Dans la même figure que la veille, à 200 mètres de la ligne d'arrivée, Jacky fait l'intérieur à Grundel qui n'en croit pas ses yeux, lui qui venait de "décompresser" à la vue du poste de chronométrage. Jacky remporte sa deuxième victoire d'étape. A deux jours de but, l'étape est longue et cassante, mais ne pose pas de problèmes majeurs aux hommes de tête. Les commentaires des pilotes après l'arrivée sont intéressants : Ickx, 2e de l'étape, sincère et naturel : "Nous avons crevé à deux reprises et nous finissons l'étape encore à plat. Mais aujourd'hui, j'ai très mal conduit". Vatanen, vainqueur de l'étape, décontracté et amusant : "J'ai appris que monfemme m'attendait à l'arrivée, alors jo me suis épêche".
Pas mal. C'est le dernier jour de course, mais Jacky ne va pas lever le pied pour autant et remporter une nouvelle victoire d'étape. Vatanen remporte ce rallye des Pharaons devant Grundel et Jacky Ickx, qui avec une voiture enfin fiable, nous a montré que l'on pouvait encore compter sur lui.
Jean Todt, le patron de Peugeot, lui aussi un vieux routard des rallyes, n'a pas caché son admiration pour Jacky Ickx. Il le connaissait bien sûr en tant que "pistard", mais là, il l'a vraiment côtoyé sur le terrain, et c'est "quelque chose" cet inépuisable Belge.
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